Le rachat de Cora et Match par Carrefour ?

En pleine recomposition potentielle du marché français de la distribution alimentaire, après la faillite de Casino, Carrefour annonce le rachat des enseignes Cora et Match pour un montant de 1,05 milliard d'euros, qu’il va financer grâce au produit de la vente, l’an dernier, de sa filiale taiwanaise.

Carrefour va racheter les enseignes Cora et Match au groupe belge Louis Delhaize pour une valeur d'entreprise de 1,05 milliard d'euros (1,2 milliard de dollars). Il s’agit de la première acquisition majeure du distributeur français sur son marché domestique depuis plus de vingt ans.

L'acquisition, réalisée entièrement en numéraire, porte sur 60 hypermarchés et 115 supermarchés, principalement dans l'est et le nord de la France, où Carrefour est peu présent. « L'adéquation géographique et stratégique est excellente », réagit l’analyste financier James Grzinic de la banque d’investissement Jefferies. « Carrefour acquiert un opérateur de petite taille, mais de bonne qualité, bénéficiant d'un grand nombre de magasins en pleine propriété [55 hypermarchés et 77 supermarchés], et ce à des conditions attrayantes. »

Le montant payé fait ressortir un ratio de valeur d’entreprise sur ventes de 0,2 fois et un ratio de valeur d’entreprise sur excédent brut d’exploitation (Ebitda) de 4,2 fois après prise en compte de 110 millions d'euros de synergies, ce qui donne à penser que Carrefour, grâce à cette opération, pourrait améliorer son bénéfice par action dès la première année. Le distributeur devrait aussi parvenir à restaurer ses parts de marché, suivant les ambitions de la direction.

Les magasins achetés ont consigné, l'an dernier, des ventes nettes de 5,2 milliards d'euros, lit-on dans le communiqué Carrefour, dont 4,3 milliards d'euros hors essence, et un Ebitda de 189 millions d'euros. « La marge de 3,6% qui en résulte semble solide compte tenu de la taille de l'entreprise, d'autant plus qu'il s'agit d'une base avant [la nouvelle norme comptable] IFRS16 », estime James Grzinic selon qui l’acquisition a certainement était financée en grande partie par la cession, l’an dernier, de la filiale taiwanaise pour 1 milliard d’euros.

L'acquisition des magasins Cora et Match, qui au vu de sa taille ne devrait pas empêcher de nouveaux programmes de rachats d’actions par Carrefour, sera finalisée au cours de l'été 2024.

22,3% du marché contre 23,5% pour Leclerc

Les actions du distributeur ont gagné jusqu’à 1,3% sur le Cac 40 dans les premiers échanges, avant de réduire progressivement leurs maigres gains. L’analyste Alexander Wahl, de la banque d’investissement Stifel, parle d’« une acquisition bon marché, opportuniste mais peu intéressante sur le plan stratégique. » Il explique que « la part de marché n'est pas tout. Acheter de nouveaux grands magasins en France, où les hypers et les supers représentent déjà plus de 80% des ventes [de Carrefour], ne semble pas être une solution. » Il dit qu’il aurait préféré une acquisition qui aurait permis au distributeur de proposer de nouveaux services « pour capter plus de clients et améliorer leur fidélité. »

Au sein de la banque privée Oddo BHF, on constate que cette opération, jugée « intéressante », va permettre à Carrefour de « recoller [au leader] Leclerc » en termes de parts de marché mais qu’elle va aussi concentrer l’exposition vers les hypermarchés et supermarchés. « Sur la base des dernières études de parts de marché, Carrefour rachèterait 2,5% de parts de marché (dont 1,8% Cora et 0,7% Match), ce qui lui permettrait d’atteindre 22,3% contre Leclerc à 23,5% (et l’écart en cumul annuel mobile, sur douze mois glissants, serait encore plus faible, 22,8% pour Leclerc contre 22,5% pour Carrefour + Cora + Match) », rapporte l’analyste Geoffroy Michalet.

Suite à cette acquisition, la part des hypermarchés dans le chiffre d’affaires réalisé en France de Carrefour (près de la moitié de ses facturations mondiales) passera de 49% à 52% et celle des supermarchés de 33% à 32%.

Source : lesechos.fr

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